dimanche 1 août 2010

Ban Ki-moon appelle Israël à alléger l'embargo sur Gaza

01/08/2010
Le secrétaire général de l'ONU, Ban Ki-moon, a pressé vendredi Israël d'alléger son embargo sur la bande de Gaza et de s'abstenir de mener des activitépas sa coopérations de colonisation en Cisjordanie, lors d'entretiens avec le ministre israélien de la Défense, Ehud Barak.
Les discussions entre les deux hommes ont porté sur un vaste éventail de sujets, dont le Liban, les implantations israéliennes et la situation générale à Gaza, et M. Ban a souligné l'importance de "desserrer à nouveau" l'embargo qui y est imposé par Israël, selon un communiqué de l'ONU.
Le secrétaire général a appelé l'État hébreu à continuer de "s'abstenir de mener des activités d'implantations et d'étendre (cette pratique) à Jérusalem-Est", une mesure destinée, parmi d'autres, à relancer "des discussions directes sérieuses" entre Israël et les Palestiniens.Sous la pression des États-Unis, Israël a adopté en novembre 2009 un moratoire de 10 mois sur la colonisation en Cisjordanie afin de favoriser la relance du processus de paix avec les Palestiniens, suspendu depuis l'offensive israélienne contre la bande de Gaza en décembre 2008.
Les Palestiniens réclament depuis longtemps un gel total de la colonisation comme préalable à la reprise de pourparlers directs.
M. Ban et Barak ne se sont pas adressés à la presse.
Le communiqué de l'ONU indique qu'ils ont eu une autre réunion, en privé, vraisemblablement consacrée à la perspective d'une enquête internationale crédible sur le raid israélien contre une flottille d'aide humanitaire en route pour Gaza le 31 mai dernier, qui avait fait neuf morts.
Au lendemain de cette tragédie, Israël avait considérablement allégé son embargo sur Gaza.
Le Conseil des droits de l'homme de l'ONU a nommé la semaine dernière trois experts chargés d'enquêter sur ce raid.
Israël, qui a ordonné deux enquêtes internes, rejette systématiquement les appels à une enquête internationale indépendante sur le sujet et indiqué qu'il n'apporterait à l'enquête du Conseil des droits de l'homme de l'ONU, qu'il dénonce comme "partiale".
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La Maison Blanche met en garde Abbas contre tout refus de dialogue direct avec Israël

01/08/2010
Le président américain Barack Obama a averti le président palestinien Mahmoud Abbas que tout refus d'une reprise des négociations directes avec Israël pourrait nuire aux relations palestino-américaines, a indiqué samedi un responsable palestinien.
M. Obama a lancé cette mise en garde dans une lettre adressée à M. Abbas, a précisé ce responsable palestinien à l'AFP sous couvert de l'anonymat. Dans le même temps, le président américain y affirme qu'en cas de reprise du dialogue, il veillerait à une extension du moratoire sur la colonisation juive en Cisjordanie qui expire le 26 septembre.
"Dans la missive, Obama met en garde Abbas contre son refus de reprendre les négociations directes avec Israël le mois prochain, avertissant que cette position aurait des répercussions sur les relations américano-palestiniennes", a-t-il dit.
Les États-Unis souhaitent relancer les négociations directes avec Israël suspendues depuis décembre 2008. Des négociations indirectes sous l'égide des États-Unis ont été lancées en mai dernier mais sans résultat jusqu'à présent.
M. Abbas refuse de passer à des discussions directes sans avoir obtenu au préalable un gel de la colonisation israélienne et des garanties sur les frontières du futur État palestinien. Israël rejette ces exigences et se dit prêt à reprendre ces négociations sans conditions préalables.
M. Obama souligne dans la lettre qu'"il est grand temps de reprendre les négociations directes" et que le Premier ministre israélien Benjamin Netanyahu "est prêt à les reprendre", ajoute le responsable, estimant que la missive en 16 points agite "la carotte et le bâton".
La lettre avertit qu'"Obama n'acceptera absolument pas le rejet de sa demande d'aller vers des négociations directes et qu'un tel rejet aurait des conséquences qui se traduiraient par un manque de confiance dans le président Abbas et la partie palestinienne", a poursuivi le responsable.
"Si vous reprenez les négociations directes, l'administration américaine veillera à l'extension du moratoire sur les colonies, mais en cas de refus elle limitera fortement son aide", avertit le président américain, selon la même source.
L'un des principaux négociateurs palestiniens Saëb Erakat a confirmé à l'AFP que M. Abbas avait reçu une lettre de M. Obama le 16 juillet.
"M. Obama y appelle les Palestiniens à entrer dans des négociations directes qui aboutiraient à la création d'un État palestinien indépendant", a-t-il dit. "Il a aussi assuré M. Abbas que l'administration américaine oeuvrerait pour mettre un terme à la colonisation en cas de leur reprise mais qu'elle jouerait un rôle moindre dans le cas contraire".
Selon le responsable qui a requis l'anonymat, M. Obama souhaiterait que les négociations reprennent vers le début du mois d'août et qu'elles traitent des questions épineuses tels les frontières et le sort de Jérusalem-est annexée par Israël.
"Nous faisons face actuellement à des choix difficiles car Netanyahu ne veut faire aucun compromis et entrer dans de telles négociations ne serait bénéfique que si l'administration américaine force le gouvernement Netanyahu à (respecter) des points de référence clairs", a-t-il ajouté. 

14 des principaux projets de loi anti-démocratiques de la Knesset

srael - 31-07-2010
Par IARC 
Le 21 Juillet, le dernier jour de la session d'été de 2010 de la Knesset, l'IARC a interpellé le Premier ministre Benjamin Netanyahu et le président de la Knesset, Reuven Rivlin, en les prévenant d'une tendance alarmante dans l’actuelle Knesset et qui a prospéré lors de la dernière session : l'utilisation par la majorité du processus démocratique, en particulier la législation, pour entraver la liberté d'expression, nuire à notre système d’équilibre des pouvoirs, et violer les droits des groupes minoritaires en Israël.
Ci-dessous la liste dressée par l'IARC des 14 projets de loi les pires de la saison:

1) Le projet de loi de Déclaration d'Allégeance des membres de la Knesset (du député David Rotem d’Yisrael Beitenu): Les membres de la Knesset seraient obligés de déclarer allégeance à Israël en tant qu'Etat juif et démocratique, à ses lois, à ses symboles, et à son hymne. Le projet de loi délégitimerait et empêcherait les groupes minoritaires de participer à la
2) Le projet de loi qui empêcherait la Haute Cour de se prononcer sur la «Loi sur la citoyenneté" (du député David Rotem et de 44 autres députés) : Il s’agit d’une tentative de contourner la Haute Cour en tant qu’autorité judiciaire indépendante en ce qui concerne la loi sur la citoyenneté, que la Cour doit encore abolir.
3) Le projet de loi sur la Cour Constitutionnelle (du député David Rotem): une tentative explicite de délégitimer la Cour suprême en établissant une autorité judiciaire alternative.
4) Le projet de loi sur la Nakba (du député Alex Miller d’Yisrael Beitenu): Toute personne qui commémorera la création de l'Etat en tant que jour de deuil ("Nakba", la catastrophe en arabe, est le terme utilisé par certains Palestiniens Israéliens pour désigner l'anniversaire de la création de l'État d'Israël) ne sera autorisé à recevoir des fonds publics. Une telle législation constitue une violation de la liberté d'expression par laquelle la majorité tente de réduire au silence une position politique particulière.
5) Le projet de loi sur l’interdiction d'incitation
(du député Zevulun Orlev, d’Habayit Hayehudi-Nouveau Parti national religieux): L'interdiction existante sur l'incitation serait élargie et inclurait le rejet d'Israël en tant qu'Etat juif et démocratique.
6) Le projet de loi de Déclaration d'Allégeance pour tous les citoyens (du député David Rotem): Tout citoyen devra prêter allégeance à Israël en tant qu'Etat juif,t démocratique et sioniste, et devra accomplir un service national militaire ou civique (national).
7) Le projet de loi d'Acceptation aux Communautés (des députés David Rotem, Israël Hasson et Shai Hermesh, Kadima): L’approbation de comités d'admission communautaire afin de rejeter les candidats qui ne correspondraient pas à la vision du monde de la communauté.
8) Série de projets de loi proposés par le gouvernement visant à limiter le pouvoir de l'opposition à la Knesset, dont : sept députés pourraient se séparer d'une faction et former une nouvelle faction, au lieu de 40 (un tiers de la Knesset ) ; augmentation de la majorité nécessaire à 55 pour approuver un projet de loi budgétaire ; si un premier ministre ne peut pas former un gouvernement après un vote de défiance, le précédent Parlement tombé serait de nouveau instauré, et bien d’autres.
9) Le Projet de loi sur le financement en provenance d'État étranger (du député Zeev Elkin, Likoud, et de d’autres députés): Un nombre de mesures strictes seraient prises pour limiter le financement étranger d'organisations à but non lucratif israéliennes. Le projet de loi a été conçu de façon stratégique pour viser certaines organisations ayant un certain penchant politique et des organisations des droits de l’homme afin de contrôler les actions de la société civile israélienne.
10) Le Projet de loi pour le Pardon des manifestants du Désengagement (le député Reuven Rivlin, Likoud, et d’autres députés) : Bien que la législation reconnaisse que le droit à la protestation politique est opportun, ce projet de loi, l'octroi du pardons aux individus qui ont été poursuivis pour diverses actes de protestation contre le désengagement de Gaza en 2005, favorise un groupe politico-idéologique spécifique car la majorité à la Knesset a besoin d’apaiser ses membres. Au lieu de cela, la législation devrait se généraliser à tous les cas dans lesquels le pardon pour activités politiques serait acceptable.
11) Le Projet de loi sur la prévention contre l'infiltration (Gouvernement): Parmi d’autres clauses, ce projet de loi permettrait de rendre l’infiltration punissable d’une peine de 5 à 7 ans de prison, y compris ceux qui aident l'infiltré. Le projet de loi vise à délégitimer la société civile et les associations d'aide aux réfugiés.
12) Le Projet de loi sur l’interdiction de Boycott (du député Zeev Elkin et d’autres députés): Toute personne qui initie, met en avant ou diffuse des documents qui servent de base au boycott d'Israël serait poursuivie pour infraction pénale et contrainte de verser une indemnité à ceux qui souffriraient du boycott. Tout étranger qui le ferait serait donc interdit de pénétrer en Israël pendant 10 ans.
13) Le Projet de loi sur la révocation de la citoyenneté pour les personnes reconnues coupables de trahison ou de terrorisme (député David Rotem): La citoyenneté est un droit fondamental et la révoquer en pareil cas serait par conséquent violer d'autres droits connexes. Le système juridique israélien a de nombreuses lois permettant de traiter les personnes reconnues coupables de terrorisme ou de trahison.
14) Le Projet de loi sur le Cinéma (du député Michael Ben Ari, Ichud Leumi): Le financement public de films serait subordonné à une déclaration de loyauté à Israël en tant qu'Etat juif et démocratique par l’ensemble de l’équipe du film.

Israël bombarde Gaza : 1 mort, 17 blessés


Gaza - 31-07-2010
Par ISM 
Vers 23h30 la nuit dernière (vendredi 30 Juillet 2010), l’académie de police située dans le bâtiment Yasser Arafat dans le quartier Al Montada du centre-ville de Gaza a été bombardée par des F-16 israéliens, blessant dix-sept personnes, dont trois grièvement. Trois enfants ont également été blessés.
Les premiers arrivés sur les lieux ont déclaré avoir trouvé le bâtiment réduit à l’état de gravats et des voitures brulées.














Photo TILDE DE WANDEL : Un homme blessé est évacué vers une ambulance.

Un homme, touché par des éclats de bombe, était blessé aux yeux et à la tête.
L'énorme impact de la bombe a été ressenti par des volontaires de l’ISM qui se trouvaient dans un café situé à proximité.
Adie Mormech, un volontaire britannique de l’ISM à Gaza a déclaré: "L'explosion a fait trembler des bâtiments situés loin de l'épicentre de l'explosion et leurs fenêtres ont été cassées. Quand nous sommes arrivés à l'hôpital Shifa, c'était le chaos. Pendant que les blessés étaient soignés, les familles des victimes n’ont pas été autorisées à pénétrer à l'intérieur. D’autres blessés continuaient d’arriver alors que les journalistes attendaient.


Photo TILDE DE WANDEL : Un père porte son enfant blessé jusqu’à un lit d’hôpital.
"D'autres personnes sont arrivées à l'hôpital, en état de choc dû à l'énorme impact de la bombe - certains étaient tellement choqués qu’ils ne pouvaient pas préciser s’ils avaient été blessés ou non.."
Un habitant de Gaza a déclaré que la bombe devait peser plus d'une tonne, comme celles utilisées pendant les 3 semaines de terribles bombardements fin 2008-début 2009, appelées opération «Plomb durci».
Pour beaucoup de gens à Gaza, l’attaque de la nuit dernière a été un souvenir traumatisant des 2 premières minutes de l'opération «Plomb durci» pendant lesquelles 300 avions F-16 ont bombardé Gaza. Les attaques ont terrorisé toute la population de la bande de Gaza et tué plus de 1400 personnes, dont plus de 400 enfants.
L’attaque israélienne de vendredi soir s’est déroulée après qu’une roquette ait atterri à Ashkelon, au sud d’Israël qui n'a fait aucun blessé, et qui aurait été tirée par une petite faction militante dans la bande de Gaza.
On fait également état également d’autres bombardement près du port de Gaza ainsi qu’à Deir el Balah et Rafah.
Pour plus d’informations, contactez :
Adie Mormech, Gaza: 05977 176 96
ISM Media Office, Ramallah: 05461 800 56
palreports@gmail.com


MISE A JOUR :
La branche militaire du Hamas a annoncé que l'un de ses chefs, Issa Abdul-Hadi Al-Batran, 40 ans, avait été tuée dans l'un des bombardements qui a touché le camp de réfugiées de Nuseirat, dans le centre de la Bande de Gaza.

Gaza : grave insuffisance des traitements sous dialyse

samedi 31 juillet 2010 - 06h:50
PCHR Gaza
Ahmed Zourob est l’un des 164 patients qui occupent chaque jour l’unité de dialyse à l’hôpital d’Al-Shifa dans la ville de Gaza. Comme les autres, il est ici parce que ses reins, détériorés par la maladie, ne peuvent pas remplir correctement leur fonction ; comme beaucoup des patients ici, il compte sur le traitement médical qu’il suit à Al-Shifa pour survivre.
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Ahmed Zourob suit le traitement sous dialyse à l’hôpital d’Al-Shifa dans la ville de Gaza. En raison du blocus, son traitement est insatisfaisant et il peut plus obtenir les médicaments dont il a besoin.
Mais l’unité de dialyse d’Al-Shifa’s doit gérer son propre état de détérioration - sous blocus depuis plus de trois années et par conséquent incapable d’assurer les soins nécessaires, ses équipements dans un délabrement perpétuel, et confrontée à une grave pénurie d’électricité. « Nous avons constaté un manque de quasiment 50% des médicaments et des machines dont nous avons besoin pour faire fonctionner cette unité à sa capacité réelle, et ceci à cause de l’occupation israélienne et du bouclage, sans compter les problèmes résultant de la crise en approvisionnement électrique » explique le Dr. Mohammad Shatat, directeur adjoint de l’unité de dialyse d’Al-Shifa, la plus importante unité de ce type dans la bande de Gaza. Les conséquences, dit-il, sont un évident déclin pour la santé et les perspectives de guérison, et même de survie, des patients.
Le traitement sous dialyse n’est pas aisé et sous aucune circonstance. Les patients souffrant de déficience rénale chronique doivent passer jusqu’à quatre heures par séance fixé à une machine de dialyse qui fait circuler leur sang par un système de filtre pour éliminer les toxines, avant de le réinjecter dans leur organisme. Dans des conditions normales, les patients suivent le traitement de dialyse trois fois par semaine et il leur est également demandé de prendre cinq types différents de médicaments, dont des antibiotiques et une combinaison d’hormones et de compléments qui protègent les reins contre d’autres dommages et empêchent un début d’anémie, explique encore le Dr. Shatat.
Pourtant le blocus imposé par Israël a rendu les traitements sous dialyse plus difficiles pour les 300 malades des reins à Al-Shifa, comme pour leurs familles. Avant le blocus, dit le Dr. Shatat, les médicaments nécessaires aux patients était disponibles à la pharmacie de l’hôpital, et ils étaient gratuits pour les malades souffrant de maladies chroniques. Maintenant, comme conséquence directe du siège, la pharmacie de l’hôpital manque de beaucoup des médicaments pourtant essentiels, y compris ceux requis pour les dialysés. Les patients et leurs familles doivent trouver d’autres sources pour ces médicaments, payant directement ces médicaments à des prix artificiellement élevés dans les pharmacies en dehors de l’hôpital, et encore à la condition que ces médicaments-là puissent être trouvés.
L’insuffisance rénale d’Ahmed a été diagnostiqué en 2008, et il est resté sans emploi à peu près depuis ce moment-là. Le blocus a empiré l’état d’Ahmed en l’empêchant à la fois d’avoir accès aux médicaments dont il a besoin à Al-Shifa et à la fois d’avoir les ressources économiques qui lui permettraient d’acheter ses médicaments en dehors de l’hôpital. « Il y a trois mois l’hôpital m’a annoncé que mes médicaments n’étaient plus disponible à la pharmacie de l’hôpital, mais sans travail je n’ai pas les moyens d’acheter moi-même les médicament. Je ne sais pas ce que je peux faire. » Sans possibilité d’obtenir les médicaments prescrits, l’état d’Ahmed s’est sérieusement détérioré ces derniers mois et on lui a récemment diagnostiqué une anémie.
Dans le cadre de sa politique de bouclage, Israël a également refusé l’importation d’équipements médicaux, dont de nouvelles machines de dialyse ainsi que les pièces de rechange nécessaires aux réparations des machines qui ne fonctionnent plus. En raison de moyens insuffisants, le traitement sous dialyse a dû être réduit pour tous les patients, passant de trois séances à seulement deux par semaine, ce qui a des implications graves pour la santé des malades, explique le Dr. Shatat : « Le traitement avec dialyse a pour objectif les reins, aussi il est absolument essentiel pour les patients . Si ceux-ci ne reçoivent pas le traitement requis, les conséquences peuvent être mortelles. » En effet, quatre patients de l’unité de dialyse sont morts en avril 2009, juste après la réduction des traitements.
Le secteur entier de la santé dans la bande de Gaza souffre d’un manque aigu de médicaments et d’équipements médicaux, à cause du blocus israélien. Selon le ministère de la Santé palestinien, 110 types de médicaments et 123 types d’équipements médicaux sont épuisés ou ont cessé de fonctionner dans la bande de Gaza rien que durant les six premiers mois de 2010. On s’attend à ce qu’encore 76 types de médicaments soient épuisés dans les trois mois à venir.
La très difficile situation que l’on rencontre dans l’unité de dialyse d’Al-Shifa à cause des restrictions dans l’entrée des marchandises dans Gaza, est aggravée par les coupures constantes d’électricité, résultat direct de la crise énergétique affectant la bande de Gaza. Pour les 1,5 million de Palestiniens à l’intérieur de la bande de Gaza, les pannes constantes d’électricité sont simplement devenues un fardeau supplémentaires dans la vie quotidienne. Mais dans l’unité de dialyse d’Al-Shifa, les pannes soudaines et fréquentes qui surviennent en plus des coupures régulières d’électricité mettent en grand danger les appareils médicaux mais aussi les vies des patients.
« Quand l’électricité stoppe pendant un cycle de dialyse, » explique le Dr. Shatat, « approximativement 300 millilitres de sang sont en dehors du corps du patient et ne peuvent pas être réinjectés. Nous avons perdu plusieurs machines de dialyse suite aux changements brusques des niveaux de puissance électrique, mais le risque pour la vie des patients est beaucoup plus grand. »
Israël permet juste l’entrée d’assez de carburant pour que la centrale de Gaza puisse fonctionner à 45% de la capacité requise pour répondre correctement à la demande à Gaza. La bande de Gaza dans sa totalité doit supporter à présent des coupures électriques allant jusqu’à douze heures par jour, perturbant tous les aspects de la vie des Palestiniens qui vivent déjà avec toutes les difficultés causées par le blocus israélien.
En conséquence, Al-Shifa dépend de quatre générateurs pour son électricité, mais ils sont anciens et ont constant besoin de réparations. « Les générateurs sont censés être des supports, et ils ne sont pas pérvus pour fonctionner en permanence, » dit le Dr. Shatat. « Maintenant les générateurs sont utilisés pour alimenter toutes les salles de l’hôpital et ils ont donc souvent besoin d’opérations de maintenance. Mais le blocus israélien rend très difficile l’obtention des pièces dont nous avons besoin ; nous avons attendu une année rien que pour des batteries, interdites pour de soit-disant « problèmes de sécurité. »
Dans ces conditions difficiles, un nombre croissant de patients dans Gaza souffrant de blessures et maladies graves sont forcés de chercher un traitement à l’extérieur du territoire assiégé. Mais la route à parcourir pour obtenir les permis nécessaires pour quitter Gaza et se rendre dans les hôpitaux à l’étranger est longue et compliquée. Des centaines de patient - y compris des femmes et des enfant - se voient tous les mois interdire cette possibilité par Israël sous prétexte de « problèmes de sécurité. » Depuis 2007, le Centre Palestinien pour les Droits de l’Homme a recensé les cas de 67 patients qui sont décédés parce qu’ils ne pouvaient pas suivre le traitement requis à Gaza et que leur avait été refusée l’autorisation de suivre un traitement médical à l’étranger.
6 juillet 2010 - PCHR Gaza - Vous pouvez consulter cet article à :
http://www.pchrgaza.org/portal/en/i...
Traduction de l’anglais : Nazem
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La palinodie du Caire Pas sérieux du tout !

samedi 31 juillet 2010 - 09h:38
Kharroubi Habib/K. Selim - Le Quotidien d’Oran
Israël enfin gagne sur tous les tableaux. Il a tout obtenu sans rien céder ni promettre.  
La Maison-Blanche veut la reprise de pourparlers directs entre Palestiniens et Israéliens. Tout indique que l’on s’achemine vers cette reprise, même si les Palestiniens n’ont obtenu satisfaction sur aucune des conditions qu’ils ont mises pour leur retour à la table des négociations et que les Israéliens n’ont pas varié d’un iota leur position sur le sujet.
Pour obtenir la reprise des pourparlers directs, Barak Obama et son émissaire pour le Proche-Orient, George Mitchell, ont exercé de fortes pressions sur le président Mahmoud Abbas et l’Autorité palestinienne pour les faire renoncer à tout préalable de leur part lui faisant obstacle. C’est pratiquement chose faite, que Mahmoud Abbas a rendue officielle en donnant son accord à des négociations directes avec le gouvernement Benyamin Netanyahu.
Pour donner un semblant de consensus palestino-arabe à sa décision, le chef de l’Autorité palestinienne a requis le feu vert de la Ligue arabe, qui le lui a accordé jeudi passé. Eux-mêmes sous pression américaine sur le sujet, les Etats arabes ont renoncé au semblant d’opposition qu’ils ont affiché quant à une reprise des négociations directes palestino-israéliennes sans l’acceptation par Tel-Aviv du plan de paix arabe global. Pour se couvrir du côté de leurs opinions nationales, ils ont assorti leur feu vert à la volonté de Mahmoud Abbas et de l’Autorité palestinienne d’aller malgré tout à ces négociations directes.
La position ainsi adoptée par la Ligue arabe est d’une hypocrisie consommée. Elle permet en effet aux Etats membres qui l’ont approuvée de ne pas s’attirer les foudres américaines, de ne pas en même temps donner l’impression d’avoir changé de position sous pression de Washington, et d’avoir la latitude d’imputer aux Palestiniens le probable échec des négociations directes en les chargeant de la responsabilité d’avoir voulu celles-ci.
En faisant mine de respecter la volonté des Palestiniens, la Ligue arabe agit avec cynisme. En fait de respect, elle pousse tout simplement ces Palestiniens à la capitulation aux pressions américano-israéliennes. Les Etats arabes savent que Mahmoud Abas et l’Autorité palestinienne vont aller aux négociations directes en position d’extrême faiblesse parce que leur démarche ne fait pas unanimité au sein du peuple palestinien et parce que eux-mêmes ont renoncé à peser sur ces négociations.
En obtenant des Arabes et des Palestiniens leur accord pour la reprise des pourparlers directs sans aucune contrepartie d’Israël, l’allié stratégique des Etats-Unis, Barack Obama a fait coup double. Primo, il peut se prévaloir d’un important succès diplomatique que les démocrates vont valoriser dans leur campagne des élections législatives américaines qui pointent. Secundo, il préserve l’entente israélo-américaine qui a semblé battre de l’aile depuis son entrée à la Maison-Blanche, et se concilie ainsi les puissants lobbys juifs prosionistes de son pays.
Israël enfin gagne sur tous les tableaux. Il a tout obtenu sans rien céder ni promettre. De quoi imposer ce qu’il veut à la table des négociations. Les Arabes (les dirigeants) quant à eux sont fidèles à leur habitude : faire semblant d’être des acteurs agissants, alors qu’ils ne sont que des subissants sans courage ni honneur.
Le Quotidien d’Oran : Analyse

PAS SERIEUX DU TOUT !

par K. Selim
Le « Comité arabe de suivi de l’initiative de paix » n’a pas vraiment rendu service à Mahmoud Abbas en soutenant la reprise des négociations directes et en laissant « au Président palestinien le soin d’évaluer quand les conditions permettront de débuter de telles négociations ». C’est comme donner à un estropié la mission de concourir sur une course de cent mètres ou sur un marathon.
La décision prise jeudi — seule la Syrie semble avoir exprimé de fortes réserves- - n’est pas un soutien au président palestinien, qui est soumis à de grosses pressions occidentales pour reprendre les pseudo-négociations « directes ». Les membres de ce comité n’ont pas l’excuse de l’ignorance. Le Premier ministre et ministre des Affaires étrangères du Qatar, Hamad Ben Jassem Al-Thani, qui préside ce comité, a souligné que les négociations directes ou indirectes ne donneront aucun résultat tant que « Netanyahu est là ».
Pourquoi faire mine d’encourager la négociation alors ? « Pour prouver au monde que nous sommes pour la paix ». Le responsable qatari a ajouté qu’une lettre allait être envoyée au président américain Barack Obama, exposant « comment nous voyons tout processus de paix ou de négociation directe » ! La belle affaire, comme si « le monde » (dans la bouche d’un dirigeant arabe, cela veut dire les Etats-Unis) ne savait pas qui veut la paix et qui ne la veut pas !
Que dit M. Amr Moussa ? Qu’il sait que M. Netanyahu n’est pas sérieux, que les Israéliens mènent un jeu politique qui consiste à gagner du temps ? Mais on y va quand même à ces négociations directes pour prouver au monde qu’Israël n’est pas sérieux !
En définitive, ce sont les Arabes qui ne sont pas sérieux ! Ils n’essayent même pas de soutenir Mahmoud Abbas, qui tente de donner des gages à son opinion publique en maintenant des exigences élémentaires pour une reprise des négociations. Ils ne font qu’essayer de plaire aux Etats-Unis, qui sont déjà dans un contexte préélectoral où tous les acteurs font assaut de surenchère prosioniste.
Les Arabes n’ont même pas essayé d’envoyer un message alambiqué - ils sont forts dans ce domaine - qui permettrait à Abbas de continuer d’essayer de résister.
En réalité, ils ont fait un cadeau à Netanyahu, le menteur et l’assassin. Il s’est empressé de le saisir pour demander aux Palestiniens des négociations « directes et franches » et sans « préconditions ». Le dirigeant israélien n’allait tout de même pas rater l’occasion qui lui est donnée !
M. Mahmoud Abbas et ses éternels négociateurs, qui ne sont pas, loin s’en faut, des foudres de guerre, sont en réalité affaiblis par la décision du comité de suivi. Ce dernier n’avait pas le souci de soutenir Mahmoud Abbas, il avait l’obsession de ne pas déplaire à l’administration Obama. Est-il acceptable, même quand on joue au « modéré », que le Comité de suivi arabe devienne un autre instrument de pression sur les Palestiniens ? Jusque-là, ce comité semblait inutile et servait d’habillage pour conférer une légitimité à la démarche de Mahmoud Abbas. Désormais, on se rend compte qu’il est dangereux. Abbas finira bien par aller aux négociations directes qui ne mèneront nulle part. Le Comité de suivi arabe n’aura pas apporté un « plus » dans sa capacité de négocier, bien au contraire.
Oui vraiment, ce n’est pas Netanyahu qui n’est pas sérieux !
Le Quotidien d’Oran : Editorial

31 juillet 2010 - Le Quotidien d’Oran
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Edward W. Said : « La Question de Palestine »

samedi 31 juillet 2010 - 19h:49
Nadia Agsous - Libertés conquises
Informer l’opinion américaine et occidentale sur la « réalité du traumatisme collectif national » du peuple palestinien. Permettre la compréhension d’une « situation pas très bien connue et certainement incorrectement appréhendée ».
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Faire prendre conscience que la question de Palestine a été ignorée par les Sionistes et les Américains alors qu’elle constitue une « part concrète et importante de l’histoire ». Mettre en lumière le fait que la question juive en Europe chrétienne s’est résolue par la colonisation des terres palestiniennes par les Sionistes, contraignant les Palestiniens musulmans et chrétiens à quitter leur patrie pour devenir des réfugiés. Faire de la question de Palestine « un objet de discussion et de compréhension » afin de la sortir du gouffre de l’Histoire et de l’état d’isolement dans laquelle elle a été confinée.
Tels sont quelques uns des objectifs qui ont incité Edward W. Said à publier, en 1979, La Question de Palestine (1). Réédité en 1992, cet ouvrage de 383 pages vient d’être publié en langue française, aux Éditions Actes Sud.
A travers cet essai historique et politique, l’auteur qui se positionne comme Palestinien précise la nature de son intervention. Ni expertise. Ni ‘témoignage personnel. Mais un ouvrage basé sur des faits vécus et une certaine conception des droits de l’homme et sur les contradictions d’une expérience sociale. Par ailleurs, E. W. Said remet en cause la « neutralité du langage » des études politiques universitaires sur le Moyen-Orient qui légitiment le sionisme lequel reproduit à l’égard du peuple arabe palestinien les préjugés occidentaux à l’égard de l’Islam, du monde arabe et du Moyen-Orient. Cette attitude nous déshumanise, nous ravale au niveau d’une nuisance à peine tolérée, écrit-il dans son introduction.
La Palestine ou l’histoire d’un peuple « juridiquement absent »
La Palestine... Un territoire colonisé par l’État sioniste dont le peuple a été persécuté par l’Europe chrétienne durant la première moitié du 20e siècle. Un peuple ‘reconnu comme l’archétype de la victime de l’Histoire qui à son tour expulse, opprime, étouffe, tue, assassine... « Des victimes de l’Holocauste, persécutrices d’un autre peuple (...) devenu victime des victimes.
Les Palestinien(ne)s... Un peuple expulsé de son territoire, qui depuis plus de soixante années, date de la Naqba (catastrophe), subit la politique expansionniste, discriminatoire et éliminatoire de l’Etat d’Israël et son lot de conséquences tragiques : ‘la dépossession, la dispersion, la dépendance, l’exil et toutes les caractéristiques de l’existence fragmentée et déstructurée d’un peuple errant bafoué dans ses droits les plus élémentaires et dans son droit de vivre libre et digne sur sa terre.
Un territoire et un peuple désigné en termes de « réfugiés » ou « d’extrémistes », « incompris », ignorés », qui vivent une expérience unique dans la région du Moyen-Orient : la rencontre dramatique et traumatisante avec le sionisme. Un drame national et collectif qui met en évidence « une histoire politique d’une complexité inhabituelle et même sans précédent » dont la situation demeure entière, non résolue, apparemment incontrôlable, irréductible.
« Les Palestiniens dans le discours occidental »
Selon E. W. Said, la détermination des Palestinien(ne)s d’imposer l’Organisation de Libération de la Palestine (O.L.P.) comme l’authentique dirigeante du peuple palestinien a joué un rôle important dans la modification de la conscience occidentale vis-à-vis des droits palestiniens. Car de son point de vue,’ ils proposaient un programme clair (...) qui incarnait une nation en exil plutôt qu’il ne faisait partie d’un vague rassemblement d’individus et de petits groupes vivant ici et là. La mobilisation et le travail structuré des Palestiniens et des dirigeants politique ont ainsi permis à la cause palestinienne de gagner en visibilité, d’entrer dans le discours américain et d’obtenir la reconnaissance, l’adhésion et le soutien d’organisations internationales (O.N.U., la Ligue arabe....) ; d’organisations transnationales (Organisation de l’unité africaine, Le Vatican) ; d’organisations non gouvernementales...
Le terrorisme a-t-il porté préjudice à la lutte du peuple palestinien. ? Pour E. W. Said, les actions terroristes menées par des Palestiniens ont crée un amalgame entre le mouvement national palestinien et les actions politiques palestiniennes terroristes qui ont eu lieu dans un contexte défini et des circonstances bien particulières. En effet, devant la détermination acharnée d’Israël à accélérer le processus pour réduire, pour minimiser les palestiniens puis pour s’assurer de leur absence en tant que présence politique et humaine dans l’équation du Moyen-Orient, les Palestiniens ont répondu, à la fin des années 1960, et début des années 1970, par des assassinats, des détournements d’avions, des prises d’otages, des attentats. Cependant, l’auteur souligne le fait que les attaques punitives des Israéliens (terrorisme d’Etat) en guise de réponse aux actions terroristes sont plus importantes et ont causé plus de dommages aux Palestiniens. ‘Le nombre de Palestiniens tués, l’ampleur des pertes matérielles, les privations physiques, politiques, psychologiques, a très largement excédé les dommages infligés aux Israéliens par les Palestiniens, écrit-il. Puis il attire l’attention sur le caractère asymétrique de la situation des Palestiniens en mettant l’accent sur l’extraordinaire disproportion, ou asymétrie, entre, d’un côté, la situation des palestiniens en tant que peuple affligé, dépossédé et bafoué, et, de l’autre côté, Israël en tant « qu’État du peuple juif », instrument direct de la souffrance des palestiniens, -qui- est à la fois énorme et largement ignorée.
Ignorée, d’une part, par les présidents américains qui refusent de reconnaître la lutte des Palestiniens pour leurs droits alors qu’ils n’hésitent pas un seul instant à célébrer le combat des dissidents russes, afghans, chinois...
Et d’autre part, par des intellectuels engagés et d’ex-politiciens qui n’approuvent pas la politique d’Israël à l’égard des Palestiniens mais qui font preuve de manque de courage car ils n’osent pas exprimer leur opinion en public. La question de la trahison des clercs concerne également ces intellectuels israéliens et occidentaux juifs et non juifs qui s’enferment dans le silence, l’indifférence, l’ignorance. Leur non engagement est du point de vue d’E. W. Said une preuve de complicité et de lâcheté. Et inévitablement, cette attitude maintient le peuple palestinien dans sa souffrance et sa tragédie .
Les relations entre les États-Unis et les Palestiniens
La position des Etats-Unis à l’égard des Palestiniens est extrêmement importante pour deux raisons. D’une part, en leur qualité de « premier patron et allié stratégique » d’Israël. D’autre part, ils constituent ‘la seule force extérieure qui cherche à avoir un rôle au Moyen-Orient.
Le lobby sioniste, avec la complicité des gouvernements de la droite israélienne joue un rôle déterminant dans la politique américaine vis-à-vis du peuple palestinien. En 1988, sur injonction de ce lobby, le dirigeant de l’O.L.P., Yasser Arafat, a été empêché d’entrer sur le territoire américain par le Secrétaire d’Etat américain, Georges Shulz. L’amendement Grassley présenté au Congrès poursuivait trois objectifs : interdire à l’O.L.P. « toute rencontre » aux Etats-Unis ; supprimer la mission d’observation de l’O.L.P. à l’O.N.U. et fermer le bureau palestinien à Washington. Mais la cour du district refusa d’exécuter. En 1979, Andrew Young, l’ambassadeur américain aux Nations Unies fut contraint de démissionner après un contact informel avec le délégué palestinien à l’O.N.U., Zuhdi Terzi. Selon E. W. Said, cette attitude d’hostilité et d’exclusion à l’égard des Palestiniens a bien sa logique. Elle est ‘l’extension de la politique officielle israélienne, immuable et pourtant toujours plus violente. Pourtant, malgré cette interdiction de contact et de rencontre avec les dirigeants palestiniens, ces derniers ont, à maintes reprises, eu des contacts secrets avec les autorités américaines. En 1970, l’O.L.P. est intervenu en faveur des Américains à Beyrouth. La protection de l’ambassade américaine ainsi que l’évacuation des ressortissants américains par la mer ont été assurées par les Palestiniens (1976). En 1979, les trente américains tenus en otage à l’ambassade américaine de Téhéran ont été libérés grâce à l’intervention de Yasser Arafat.
Malgré le fait que la Palestine a toujours été une question « secondaire » aux State-Unis voire ‘une affaire de politique intérieure américaine, contrôlée depuis 1948 par le lobby israélien, la question de Palestine a commencé à émerger dans la conscience américaine grâce à trois facteurs.
Primo, l’influence des Palestiniens et des Arabes américains vivant aux États-Unis.
Secundo, les efforts de l’opinion indépendante ou libérale, des organisations et des militants représentant l’opposition anti-guerre et anti-impérialiste aux États-Unis.
Tertio, le rôle de Juifs américains et européens, d’opposants à la guerre en Israël, d’organisations et de groupes qui soutiennent « La Paix Maintenant ».
Yasser Arafat... l’Intifada...
Malgré l’exil, la dispersion, les lois répressives des certains pays arabes. En dépit de l’hostilité et de la politique éliminatoire d’Israël à l’égard des Palestiniens avec le soutien des Etats-Unis, le peuple palestinien a cependant pu s’unir autour d’une figure nationale et politique personnifiée par Yasser Arafat. E.W. Said le décrit comme un personnage ayant une sorte de double personnalité : l’une, l’indiscutable et immédiatement reconnaissable symbole de la Palestine, l’autre, le chef politique avec lauriers et privilèges, et aussi les inconvénients que cette sorte de personnalité suppose.
Les apports de cette figure politique à la cause nationale palestinienne durant les deux décennies de sa direction sont nombreux. Cet homme qui bénéficiait d’une grande popularité auprès de son peuple a permis l’instauration d’un système politique démocratique, contrairement aux pays arabes avoisinants. Il a conduit ses compatriotes vers une coexistence avec Israël et instauré des modes d’interaction qui ont facilité la communication avec son peuple. Il a été l’un des rares leaders des luttes nationales à empêcher le développement d’une violence sectaire ou interpalestinienne.
Si les apports de Yasser Arafat ont servi la cause du peuple palestinien, il semble néanmoins important de noter que durant son leadership, les Palestiniens n’ont pas cessé de perdre des terres en Cisjordanie, dans la bande de Gaza et à Jérusalem- Est. En 1982, lorsque les forces israéliennes ont envahi le Liban, les Palestiniens ont subi d’importantes pertes civiles et militaires, « terribles et lointaines retombées des accords de Camp David », écrit E.W. Said. Et tout en adoptant une posture des plus objectives, l’auteur propose de laisser à des experts le soin d’évaluer les années de leadership de cet homme qu’il décrit comme une figure tragique d’une extraordinaire trempe politique.
L’un des aspects de la vie palestinienne qui a servi de modèle aux dirigeants de l’O.L.P. concerne l’Intifada, c’est-à-dire « l’insurrection nationale palestinienne(...) contre l’injustice » qui a éclaté dans les territoires occupés. Ce modèle de lutte durable, relativement non violent, inventif, courageux et étonnement intelligent a influencé d’autres peuples, notamment dans les pays arabes, de l’Europe de l’Est, d’Afrique, d’Asie... Car là où les troupes israéliennes tirent sur les civils, les harcèlent et les maltraitent, les Palestiniens inventent des moyens pour contourner ou traverser les barrières. Là où les prescriptions d’une société encore largement patriarcale maintiennent les femmes dans la servitude, les palestiniens leur donne une nouvelle voix, une nouvelle autorité, un nouveau pouvoir..., écrit E.W. Said..
Deux facteurs ont cependant contribué à affaiblir l’Intifada.
Primo, la crise du Golfe qui a favorisé l’isolement arabe et international de l’O.L.P. et le dénuement des Palestiniens vivant au Golfe.
Secundo, Le quota des migrants russes vers Israël n’a pas été limité dans l’arrangement qui a été conclu entre les États-Unis et la Russie. Cet état de fait a encouragé la migration des Juifs russes en Israël en très grand nombre.
La Palestine... un devoir humain et humaniste
A la lecture de cet essai instructif, objectif, riche et enrichissant destiné à toute personne qui s’intéresse à la question de Palestine et/ou qui souhaite comprendre la problématique du peuple palestinien, un constat s’impose comme une évidence. Malgré la politique d’extermination d’un Etat qui s’est construit et qui continue de se construire sur la base du déni de la Palestine et des Palestiniens, le peuple palestinien arabe continue d’exister.
La Question de Palestine est un ouvrage incontournable car il propose une version objective et documentée du conflit israélo-palestinien et permet de comprendre la tragédie du peuple palestinien. Par ailleurs, il dévoile la réalité de l’Etat d’Israël et contribue à réajuster les représentations occidentales et autres de la réalité palestinienne et israélienne. C’est pourquoi, il mérite d’être recommandé, commenté, discuté voire diffusé et ce, afin de sortir la question de Palestine du cercle des spécialistes, des experts et des initiés.
Porter la lutte du peuple palestinien est un devoir. Notre devoir en tant que personnes humaines ! Car aucun être humain ne devrait être menacé de « transfert » hors de sa maison ou de sa terre ; aucun être humain ne devrait faire l’objet de discrimination parce qu’il n’appartient pas à telle ou telle religion ; aucun être humain, pour quelque raison que ce soit, ne devrait être dépouillé de sa terre, de son identité, de sa culture. Car les Palestiniens en leur qualité d’êtres humains et en tant que peuple, ont aussi droit à l’autodétermination, à leur terre, à leur patrie, à leur mémoire, à leur identité, à leur personnalité, à leurs oliviers, à leurs citronniers, à leurs maisons.
C’est indéniable ! Le peuple palestinien vit une des tragédies les plus honteuses du 20e et du 21e siècles. Gens d’ici et d’ailleurs, vous qui avez au coeur le souci de la justice, de la liberté et de l’égalité, n’est-il pas urgent de dire et d’agir afin de ne pas laisser se perpétuer l’extermination d’un peuple qui aspire à vivre libre sur les terres de sa partie, la Palestine ? Gens d’ici et d’ailleurs, n’est-il pas de notre devoir d’arrêter le cours d’une histoire tragique qui reproduit les atrocités et les traumatismes d’une époque que beaucoup qualifient comme une période sombre, très sombre de l’humanité ?
1) Dans la préface de l’édition de 1992, Edward W. Said précise que l’ouvrage La Question de Palestine a été écrit entre 1977 et 1978 et publié en 1979 aux Vintage Books Éditions.
(JPG) Edward W. Said : « La Question de Palestine »
# Broché : 382 pages
# Editeur : Actes Sud (28 février 2010)
# Langue : Français
# ISBN-10 : 2742789979
# ISBN-13 : 978-2742789979
# Prix conseillé : 25 €
18 mars 2010 - Libertés conquises - Vous pouvez consulter cet article à :
http://libertesconquises.blogspot.c...
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Connivence entre Israël et un cheikh en exil pour un coup d’Etat dans un Emirat du Golfe

samedi 31 juillet 2010 - 07h:26
Robert Booth et Ian Ferguson - Guardian
Israël appuie un cheikh arabe en exil qui est sur les rangs pour prendre le contrôle d’un Emirat du Golfe, stratégiquement important, à seulement 60 km de l’Iran.
L’ambassadeur israélien à Londres, Ron Prosor, a rencontré le cheikh Khalid fils de Saqr al-Qasimi, et prince héritier en exil du Ras al-Khaimeh (RAK), qui lui a demandé de l’aider dans sa campagne pour évincer les dirigeants de cet Emirat le plus au nord des Emirats arabes unis.
La rencontre a eu lieu à Londres en mars et fut suivie d’appels téléphoniques, d’appuis et de conseils plus larges, d’après le compte rendu des contacts par le Guardian.
Khalid, qui a été basé à Londres et a pris pour agent un avocat-conseil d’Ickenham, est sur les rangs pour remplacer son père à l’agonie, le cheikh Saqr, et son demi-frère, le cheikh Saud, afin de prendre le contrôle du Ras al-Khaimeh.
L’implication d’Israël dans ce qui serait un coup d’Etat sans mort d’hommes dans l’une des régions les plus sensibles du monde, serait « extrêmement gênante », selon le Dr Christopher Davidson, spécialiste de la politique des Emirats arabes unis à l’université de Durham.
Khalid, qui fut envoyé en exil en 2003, prétend que le RAK est actuellement une plaque tournante du trafic d’équipements pour armes nucléaires pour l’Iran ; il a dépensé plus de 4 millions de livres en relations publiques internationales et en campagne de lobbying pour persuader les politiciens états-uniens et le lobby proisraélien aux Etats-Unis qu’ils y gagneraient sur la sécurité si c’était lui qui dirigeait l’Emirat.
L’alliance avec Israël est le dernier coup de théâtre dans l’épopée déjà extraordinaire des tentatives de Khalid pour parvenir au pouvoir. En juin, le Guardian révélait que le financement de son action s’acheminait par le canal de Peter Cathcart, président de conseil paroissial et passionné de chemins de fer à vapeur miniatures, qui dirige une entreprise familiale d’avocats-conseils à Ickenham, dans l’ouest londonien.
Il s’est à son tour épuisé auprès des grands lobbyistes de Washington, des consultants californiens en relations publiques et des experts militaires pour monter des dossiers qui accablent le régime du RAK.
Prosor a fait pression sur ses contacts au gouvernement US pour le compte de Khalid dont les assistants sollicitaient de l’aide pour organiser des rencontres à Washington avec quiconque serait intéressé par leurs demandes de sanctions censées flanquer un bon coup au RAK, particulièrement à propos des équipements pour le programme nucléaire iranien, il y a tout pour un complot dans ce ballet quotidien.
Un courriel de Cathcart au cabinet de l’ambassadeur fait savoir que « Son Altesse... a beaucoup apprécié son entrevue avec l’ambassadeur ».
En avril, Cathcart s’est arrangé pour que les deux hommes puissent avoir un entretien téléphonique alors que le cheikh était à Oman, et un enregistrement de la conversation par Cathcart montre que l’ambassadeur « travaille avec certaines personnes de son côté » et « a promis que la question sera réglée en sa faveur (du cheikh) ».
Le cheikh Saqr est attendu à mourir à l’hôpital d’Abu Dhabi et son fils, le cheikh Saud, 54 ans, prince héritier en place, s’est vu demander de commencer à préparer sa veillée mortuaire, un évènement lourd de sens pour la politique des Emirats, qui est susceptible d’être suivi par les dirigeants d’Abu Dhabi qui auront une grande influence sur celui des fils qui lui succédera.
« Lors de la rencontre avec l’ambassadeur israélien, il [cheikh Khalid] a envoyé des signaux à Abu Dhabi et à Washington DC comme quoi il se joindrait à une guerre contre l’Iran le cas échéant, » dit Davidson. « Il s’agit d’un nouveau genre de coup d’Etat. Il ne nécessite aucune menace d’égorgements, mais plutôt de dépenser de grosses sommes d’argent en communications internationales. C’est le premier du genre et je fais le pari qu’il va réussir. Je pense que d’ici la fin de l’été, nous en connaîtrons l’issue. »
Interrogé sur l’implication d’Israël, Peter Ragone, porte-parole de Khalid, répond : « La relation du régime actuel du RAK avec l’Iran est d’une grande importance, particulièrement dans ce contexte de tentatives de stopper la circulation des armes, des marchandises et de la technologie qui traversent le RAK à destination de la République islamique. Le cheikh Khalid et des représentants de son staff se rencontrent en permanence avec des élus, des représentants de premier plan de gouvernements et d’autres des médias de différents pays. En fait, cette semaine, des représentants du cheikh Khalid sont à Washinton DC et rencontrent l’establishment de la sécurité nationale et de la politique étrangère qui sont très préoccupés par l’activité dans le RAK. »
Odelia Englander, porte-parole de l’ambassade israélienne à Londres, n’a pas voulu faire de commentaire.
28 juillet 2010 - Guardian - traduction : JPP
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L’état d’Israël fait la guerre à ses propres citoyens

dimanche 1er août 2010 - 06h:59
Gadi Algazi - Tarabut
C’est une guerre permanente, une guerre d’usure contre une partie des citoyens du pays, une guerre dont l’arsenal inclut les interdictions de construction et des ordres de démolitions et dont les soldats sont les inspecteurs des bâtiments, écrit Gadi Algazi.
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Photo : al-Arakib 27.7. Photo by Silan Dalal, ActiveStills.org
Un épisode de la guerre d’usure contre les Bédouins
Aujourd’hui, un village entier a été détruit en Israël ; un village bédouin non reconnu : al-Arakib au nord du Néguev, à quelques kilomètres au nord de Beersheba, près de la route 40. Des centaines de policiers et de membres des unités de Patrouille Spéciale, des bulldozers et des personnels de sécurité ont participé à l’opération. Trente militants de gauche de différentes régions du pays ont parvenu au site au dernier moment, en signe de solidarité avec les habitants et pour protester contre la destruction. Mais contre des forces si supérieures et si dissuasives, il n’y avait guère de chances. La police a créé une zone tampon entre les Bédouins et leurs maisons ; elle formait un mur humain entre les militants et habitants et les maisons — tout en arrêtant plusieurs militants. Les femmes et les enfants ont été expulsés de leur maison. Et puis devant les yeux des gens d’al-Arakib, les bulldozers ont détruit leurs maisons et leurs champs.
Rien ne ressemble à la démolition d’une maison.
Nous savons : privations et discriminations, négligence et privatisations n’existent pas qu’en Israël. Même dans les pays auxquels les politiciens israéliens rêvent souvent d’appartenir, les ‘États blancs et bien ordonnés’ — il y a racisme, discriminations et privations. Mais tous les Etats ne mènent pas la guerre contre leurs propres citoyens jusqu’à démolir leurs maisons.
Quand les autorités mobilisent des centaines d’agents de sécurité, les unités des Patrouilles Spéciales et la police pour une opération devant débuter à l’aube, quand vous amenez des bulldozers pour détruire les maisons de civils ; quand vous déclarez qu’ils sont un ennemi potentiel et agissez préventivement pour empêcher un risque imaginaire par la destruction et la violence, c’est la guerre. Guerre moderne bien sûr : guerre dont l’arsenal n’inclut pas seulement des tanks, mais des bulldozers ; pas seulement des avions, mais des permis de construire et des décisions des comités d’aménagement du territoire. Et le gouvernement d’Israël, au nom de l’État, mène une guerre continue contre ses citoyens discriminés, contre les pauvres et les désavantagés. Ce gouvernement ne néglige pas seulement ces citoyens, il dépossède, menace et détruit.
Souvenons-nous : ce sont les gens d’al-Arakib qui dans le passé, ont vu leurs champs arrosés de pesticides par avion, leur santé affectée et leurs champs détruits. À la Knesset, ceux qui défendaient ses actions ont discuté de la dose exacte de pesticide à utiliser. Les gens souffraient-ils réellement de migraines et d’effets secondaires comme ils le prétendaient ? Était-il possible d’utiliser une dose plus raisonnable ? Il fallut plusieurs années avant que la Cour Suprême déclare finalement que l’épandage aérien de ces champs était un acte clairement illégal.
L’ennemi intérieur
Alors pourquoi apporter cette destruction sur les gens d’al-Arakib ? La veille même des démolitions, les récentes remarques du premier ministre Benjamin Netanyahou concernant le projet de Loi de Loyauté ont été publiées. Netanyahu a indiqué clairement sa position :
« Nous sommes un État-nation, ceci veut dire que la souveraineté absolue du pays est réservée au peuple juif [...] Aujourd’hui, une campagne internationale est menée contre la définition d’Israël comme État juif. Je ne peux pas laisser les choses en l’état [sans un serment de loyauté révisé, GA], parce que nous sommes attaqués sur cette question. Le sens de ces attaques est que divers éléments sont susceptibles de demander leurs propres droits nationaux et les droits d’un État dans l’État d’Israël - au Néguev par exemple, s’il devient une région sans majorité juive. Ceci s’est produit dans les Balkans et constitue une réelle menace » (Souligné par moi ; la déclaration de Netanyahou était dans l’édition hébreu d’Haaretz (26/7/2010) mais pas dans celle en anglais).
Les mots sont clairs : l’État appartient aux Juifs, pas à tous ses citoyens. La pleine égalité civile de ses citoyens — individuelle et collective — constitue une menace. D’où l’effet miroir : une agression imaginaire (« attaqués », « réelle menace ») justifie une agression réelle. Les Bédouins du Néguev sont transformés en « réelle menace », parce que quelque chose pourrait s’y produire ; Netanyahou ne dit pas quoi mais il se réfère aux Balkans. Il y a eu plusieurs cas de nettoyage ethnique dans les Balkans. Les partisans du nettoyage ethnique expliquent souvent qu’ils ne font que se défendre d’un groupe minoritaire, dont la simple existence est une menace à leurs yeux.
De quoi sont accusés les Bédouins ? Comment leur simple existence est-elle devenue une « réelle menace » ? Le Néguev, dit Netanyahou, pourrait devenir une « région sans majorité juive ». Quelle bonne blague ! vous pouvez aller d’une région à l’autre dans le pays et découvrir que dans une zone particulière en Israël il n’y a pas de majorité juive, par exemple entre Kafr Qara’ et Umm al-Fahem, ou entre Sakhnin and ‘Arabe. Et alors, ne faut-il pas faire quelque chose contre cette menace ? Oui bien sûr, et on le fait ! Pensez au projet d’établir la ville d’Harish dans le Wadi ‘Ara, pas pour résoudre la crise du logement que subissent les habitants actuels de la zone, ni dans le cadre de plans de développement bénéficiant à tous les habitants de la région, mais plutôt comme une tentative d’utiliser la crise du logement des ultra-orthodoxes comme une arme contre les habitants Arabes [Palestiniens] de la région — tout en empêchant en même temps les citoyens Arabes de se développer et d’étendre leurs propres communautés. Juste comme les colonies établies dans le nord pour encercler et diviser, pour combattre la « menace » des communautés arabes en Galilée.
C’est une guerre permanente, une guerre d’usure contre une partie des citoyens du pays, une guerre dont l’arsenal inclut les interdictions de construction et des ordres de démolitions et dont les soldats sont les inspecteurs des bâtiments et la Patrouille Verte.
Et alors que tout cela a lieu, on demande aux citoyens Arabes de faire leur service national et de prouver leur loyauté à un État qui n’est pas loyal envers eux. Il y a à peine quelques semaines, près du croisement Shoket dans le Néguev, dans un contexte de démolitions quotidiennes de maisons, un club de soldats Bédouins a été démoli. Alors, quel est le message ? Clairement : aucun service, militaire ou civil, ne garantira l’égalité des droits. Le Druze de Galilée [qui fait son service militaire] ne bénéficie pas vraiment de l’égalité, n’est-ce pas ?
Évacuer, déplacer, expulser, construire, évacuer
Alors pourquoi faut-il évacuer les gens d’al-Arakib ? Pourquoi sont-ils chassés ? Les habitants d’al-Arakib ne sont pas des ‘envahisseurs’ sur les terres d’État. Leur village existe depuis avant la fondation de l’État. Comme des milliers d’autres Bédouins Arabes du Néguev, ils ont été expulsés, évacués, déplacés ‘temporairement’, avec ou sans promesse d’être autorisés à revenir, pour une semaine ou pour six mois, mais en fait pour de bon — et puis leurs terres ont été confisquées. Le Néguev est plein de communautés bédouines évacuées et transférées vers différents emplacements. C’est facile pour l’État de croire que les Bédouins sont sans terre, que ce sont des simples nomades sans droits. C’est une fiction commode que l’Etat peut réciter pour justifier leur transfert forcé de lieu en lieu. En vérité, c’est l’État qui a retransformé les Bédouins en ce que Hana Hamdan a appelé un ‘nomadisme forcé’.
On dit aux gens que l’État essaye de sédentariser les Bédouins, de les ‘moderniser’. En réalité, c’est l’État qui s’active à les nomadiser à nouveau, en sabotant leur emprise sur leurs terres. Dans les villes où l’État essaie de les clôturer, tout en ignorant leur mode de vie, leurs traditions, leur culture, leurs droits — là, les Bédouins ne seront plus liés à la terre. Ils deviendront une source de travail bon marché.
Les Bédouins peuvent être transférés de place en place pour des raisons de sécurité nationale, comme au début des années 1950, puis être à nouveau transférés et pour des raisons de paix, comme à la fin des années 1970, après le traité de paix d’Israël avec l’Égypte, pour que de nouvelles bases de l’armée soient construites dans le Néguev. Ils peuvent être évacués pour des raisons d’environnement, parce qu’ils se sont établis sur des « espaces ouverts » — et puis les mêmes milliers d’hectares peuvent être alloués à des ‘ranchers individuels’, des ranchers juifs bien sûr, qui ‘garderont les terres nationales’, en s’établissant sur ces mêmes ‘espaces ouverts’.
En réalité, sans même que le public l’ait remarqué, le 17 juillet, la Knesset a passé une des plus importantes pièces de la législation récente : une loi qui légalise rétroactivement des saisies massives de terres et de ressources, et des colonies non autorisées clairement illégales ; une loi qui alloue la terre à des intrus — mais des intrus positifs, les « aventuriers » Juifs qui ont établi des ranchs individuels pour eux-mêmes dans le Néguev.
Qui sont les intrus ?
Pour le bénéfice de qui il faut y évacuer les habitants d’al-Arakib ? Pour planter des forêts par le Fonds National Juif (KKL/FNJ, ndt). Rien de moins. Évacuer des gens pour des arbres — les arbres, comme le Fonds National Juif a dû l’admettre, sont plantés sans plan directeur et sans raison environnementale ou agricole. Ce ne sont pas des arbres bénéfiques, mais plutôt des arbres intrus. Des arbres conçus pour assurer le contrôle.
On peut voir ce genre d’arbre ailleurs. On voit de tels arbres près des colonies en Cisjordanie, des centaines et des centaines de pousses, parfois simplement plantés dans leur pot, pour assurer l’emprise sur des champs où les agriculteurs Palestiniens sont interdits d’entrer. Si vous visitez ‘Ajami (à Jaffa) ou Kfar Shalem (à Tel-Aviv sud), vous verrez de tels bois décoratifs, des bois plantés pour assurer le contrôle, hectare après hectare, pour assurer les droits des requins de l’immobilier ou simplement limiter l’emploi de la terre par les habitants locaux. Et autour d’al-Arakib, vous pouvez vraiment voir des centaines et des centaines de tels arbres : des collines nues, sans herbe, sur lesquels se tiennent droits, comme des soldats en formation, des centaines d’arbres conçus pour empêcher les gens d’al-Arakib de travailler leurs terres. Ces arbres sont une barrière, une barrière vivante.
Al-Arakib n’est pas un cas unique : deux autres villages non reconnus du Néguev nord, Um-Hiran and ‘Atir, où les habitants vivent depuis plus de 50 ans (ils y ont été transférés depuis leur emplacement précédent par ordre des Autorités de la Loi Martiale), sont supposés disparaître pour que leur place soit prise par une forêt — la forêt Hiran. Aujourd’hui, il faut un regard perçant pour y voir une forêt, parce qu’il y a aucun arbre. La forêt est un projet, et les habitants actuels sur les lieux sont un simple obstacle à sa réalisation. Mais cachée derrière la forêt virtuelle il y a une communauté virtuelle, une nouvelle communauté, pour Juifs seulement — Hiran. C’est ainsi qu’on rend le Néguev juif.
Les nouveaux plans de développement du Néguev sont des plans de dépossession. Les Arabes Bédouins furent submergés par une l’immense vague de dépossession au début des années 50, ils ont à nouveau payé le prix du traité de paix avec l’Égypte, et ont été expulsé par force du peu qui leur restait, des lieux où dans certains cas ils avaient été transférés par les Autorités de la Loi Martiale, vers d’autres emplacements souvent non viables. Et maintenant nous sommes face à la prochaine grande vague. Il est important de noter que cette vague brutale, qui détruit toute possibilité de développement régional alternatif bénéficiant à tous les habitants du Néguev, dans l’intérêt de judaïser la région — vient d’une collaboration bien planifiée entre le capital privé et les entreprises avec l’État.
Les plans futurs pour le Néguev (Blueprint Negev) ont été préparés par une firme de consultants américaine, McKinsey & Company (la première firme de consultants privés dont les services aient été utilisés par l’armée israélienne) ; l’initiative a été menée par le Fonds National Juif des USA (JNF-USA). C’est un énorme partenariat entre l’État d’Israël et du capital privé étranger. Et pourtant, c’est eux qui osent exiger une loyauté, quand leur propre loyauté va pour des intérêts étrangers ! Est-il vraiment surprenant d’apprendre que Shimon Peres a mis en avant le plan avec tant d’enthousiasme ? On ne peut pas oublier l’autre partenaire : le projet est le ‘bébé’ du milliardaire de droite, président du FNJ-USA, Ron Lauder [fils d’Estée Lauder, et président du très sioniste Congrès Juif Mondial, ndt]. Et les nouveaux plans de colonisation sont développés par le FNJ en conjonction avec "Or - National Missions”, dans le but de judaïser le Néguev et la Galilée.
Ceux qui ont assisté aujourd’hui à l’évacuation d’al Arakib peuvent facilement conclure par erreur et croire que les citoyens Bédouins d’Israël ne s’élèvent que contre les forces de sécurité. Ce n’est pas le cas. Ils s’élèvent pour leurs droits élémentaires. Mais ils font face à une coalition puissante qui travaille contre eux, composée à la fois des autorités de l’État et d’acteurs non étatiques — le FNJ et les forces de sécurité, les entreprises privées et les colons. Et nous devons nous tenir ensemble avec eux.
28 juillet 2010 - Tarabut - Hithabrut - Vous pouvez consulter cet article à :
http://www.tarabut.info/en/articles...
Traduction de l’anglais : Jean-Pierre Bouché
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Main basse sur Jérusalem : Un plan de « décapitation du processus de paix »

publié le samedi 31 juillet 2010
Sylviane de Wangen

 
Consolider la conquête de Jérusalem pour ne plus jamais la lâcher, telle a été la politique israélienne dès après la guerre de 1967. Aujourd’hui c’est à une fuite en avant à marche forcée que l’on assiste comme si Israël redoutait que la ville ne lui échappe...Tout est fait sur le terrain pour empêcher que la partie orientale ne puisse devenir la capitale de l’Etat de Palestine.
Déjà en 1950, contrairement aux dispositions des armistices et nonobstant la résolution de l’ONU du 19 décembre 1949 qui avait décidé d’internationaliser la ville – coupée de fait en deux par la ligne d’armistice, entre l’Etat d’Israël et la Transjordanie, Israël en avait annexé la partie occidentale et le parlement israélien avait proclamé que « Jérusalem est, et a toujours été sa capitale ».
En 1967, quand toute la Cisjordanie y compris Jérusalem Est tomba entre les mains d’Israël, un processus permanent d’appropriation de la ville commença. Dès juillet 1967, celle-ci fut annexée par Israël, des centaines de maisons palestiniennes furent détruites, leurs habitants expulsés, leurs terres confisquées pour y construire des logements juifs. En juin 1980, le parlement israélien adopta une loi fondamentale proclamant « Jérusalem entière et réunifiée » « la capitale de l’Etat d’Israël », décision aussitôt condamnée par l’ONU. En même temps la superficie de la ville fut presque triplée pour en modifier l’équilibre démographique.
Les gouvernements successifs d’Israël veulent réaliser sur le terrain les conditions pour assurer une majorité juive dans la ville. Une stratégie de harcèlement est mise en place pour inciter les Palestiniens à partir. Au centre de cette stratégie, la destruction de maisons palestiniennes n’a jamais cessé tandis que la population est toujours soumise à l’immense difficulté d’obtenir un permis de construire, même après les accords d’Oslo, sans compter que la précarisation du statut des habitants palestiniens fait d’eux des étrangers sur leurs propres terres. Il faut ajouter que, pour faciliter la séparation en même temps que l’appropriation de territoires, un réseau d’infrastructures routières et ferrées conçues pour l’usage des colons et pour assurer la continuité entre l’Etat d’Israël et les colonies juives en Palestine a été construit.
Et bien sûr, depuis 2005, c’est le mur de Jérusalem : il suit un parcours qui a bien peu à voir avec les questions de sécurité. Il dessine de fait de nouvelles frontières étendues à la ville et enferme les Palestiniens dans une zone de plus en plus exiguë, leur rendant la vie infernale, les empêchant de pouvoir aller prier dans leurs lieux saints et contraignant un grand nombre d’entre eux à la précarité en cassant la vie économique.
Et voilà que le journal israélien Haaretz révèle le 28 juin dernier que le conseil municipal du maire israélien Nir Barkat devait approuver le nouveau plan directeur préparé par la commission pour la planification urbaine. Celui-ci, d’après le journal, vise à faciliter la construction de nouvelles colonies israéliennes et l’expansion de celles existant dans la zone arabe (est) de la Ville Sainte (sous occupation depuis 1967 d’après le droit international et « annexée » d’après le droit israélien). Son importance réside surtout dans le fait qu’il ne fait plus référence à Jérusalem comme à une ville encore divisée ; au contraire il dessine une ville homogène sous la souveraineté d’Israël. L’idée de fond est que la zone Est ne sera jamais restituée aux Palestiniens malgré le fait que le statut futur de la zone arabe soit une des questions centrales pour toute négociation israélo-palestinienne. Ce plan, dit Ghassan al-Khatib, porte-parole de l’Autorité palestinienne à Ramallah, « est plus qu’une provocation. C’est de fait la décapitation du processus de paix. »
« Barkat n’est pas le premier ni le seul à avoir entrepris de judaïser Jérusalem Est » écrit Uri Avnery dans sa chronique hebdomadaire du 10 juillet dernier, « Judaïser signifie faire disparaître toutes les autres couleurs, détruire les strates laissées par de nombreuses générations d’amoureux de la ville, afin d’éliminer des milliers d’années d’histoire et de création culturelle. (…) Barkat est le maire de Jérusalem Ouest et le gouverneur militaire de Jérusalem Est. Lui et son complice dans cette opération, le Ministre de l’Intérieur Eli Yishai, font tout ce qui est possible pour pousser dehors la population non-juive ».
Les résidents de Jérusalem victimes de cette politique tentent de résister avec détermination. En particulier ceux de Sheikh Jarrah et de Silwan ont rejoint la lutte de résistance populaire non violente menée depuis cinq ans dans les villages divisés par le mur en Cisjordanie.
Même des Israéliens juifs, sionistes et pratiquants refusent cette politique. C’est le cas de Don Futterman, directeur de projet du Fund Moriah en Israël, fondation privée américaine dont la mission est de soutenir la société civile et la démocratie, l’insertion des immigrants et l’éducation en Israël, qui, commentant le plan directeur, écrit notamment dans un article publié le 7 juillet dans le journal Haaretz : « (…) Le projet du Plan de déporter des Palestiniens suggère que le Plan est à la fois l’instrument de la campagne menée par les colons pour débarrasser la Vieille Ville de sa population arabe et celui du gouvernement pour éviter que Jérusalem ne devienne un jour la capitale d’un Etat palestinien, contrairement aux déclarations de pure forme en faveur de la solution de deux Etats. (…) Nous devons rejeter ce Plan parce que ce Plan et ses concepteurs sont anti-juifs et anti-sionistes. C’est le produit d’esprits qui veulent montrer au monde qui est le boss à Jérusalem... »
Cœur de la Palestine, économique et touristique, culturel et religieux, symbolique et politique, Jérusalem est aujourd’hui l’enjeu crucial du conflit, la question dans laquelle Israël a pris tous les risques depuis le début de son existence, sacrifiant les hommes, les principes et les croyances les plus sacrés aux pierres. Combien de consciences mondiales devront-elles s’insurger sur ce qui se joue en cette ville dite sainte mais devenue une terrible poudrière, pour que la communauté internationale – qui n’a jamais reconnu l’annexion au moins de sa partie orientale – à commencer par les pays de l’Union européenne et les Etats-Unis, ces chers amis d’Israël, prennent « très amicalement » de vraies sanctions pour arrêter cette destruction systématique de l’âme de cette ville et de toute chance de paix. Ils peuvent sauver Jérusalem et sauver la paix. Le feront-ils avant qu’il ne soit trop tard ?
publié le 30 juillet par Confluences méditerranée
C. Léostic, Afps

Entrée en vigueur de la Convention contre les sous-munitions : Les USA, Israël, la Chine et la Russie « piégés »

publié le samedi 31 juillet 2010
R. I. & Agences

 
Le Comité International de la Croix-Rouge (CICR) et les ONG qui mènent la lutte contre les armes à sous-munitions espèrent que l’entrée en vigueur de la Convention d’Oslo, demain, va forcer les grandes puissances militaires à renoncer à leur utilisation.
La Convention sera ainsi applicable six mois après la ratification par plus de trente pays du traité conclu en décembre 2008, à Oslo, et signé à ce jour par 107 nations. Le texte interdit l’emploi, la production, le stockage et le transfert de cette catégorie d’armes. Pour le secrétaire général des Nations unies Ban Ki-moon, cette Convention est une « avancée majeure » pour débarrasser le monde de ces « armes ignobles » [1]. Les bombes à sous-munitions sont larguées par voie aérienne ou tirées par voie terrestre.Le conteneur s’ouvre dans les airs et éjecte les sous-munitions, de la taille d’une balle de tennis, qui se dispersent sur de larges zones. De 5 à 40% des sous-munitions n’explosent pas au contact du sol et peuvent rester actives pendant des années durant lesquelles elles peuvent tuer ou blesser des civils, dont des enfants plus vulnérables car ils sont tentés de les ramasser. La coalition contre les armes à sous-munitions estime le stock mondial à plus d’un milliard de bombes, mais de grandes puissances militaires comme la Chine, la Russie, les Etats-Unis et Israël, qui en possèdent la plus grande partie, ont jusqu’à ce jour refusé de signer la Convention d’Oslo.
Un milliard de bombes à retardement
Les Etats-Unis à eux seuls disposeraient de stocks d’armes contenant environ 800 millions de sous-munitions, selon la Coalition contre les bombes à sous-munitions citant des documents du Congrès américain. Vingt-deux des 29 Etats membres de l’Otan ont signé le texte, dont le Royaume Uni, l’Allemagne et la France qui possèdent chacun des stocks estimés à 50 millions de sous-munitions. Le président du CICR, Jakob Kellenberger, a salué l’entrée en vigueur de la Convention, qui « va stigmatiser l’utilisation des armes à sous-munitions ». « Nous espérons que l’entrée en vigueur (de la Convention) va aussi avoir un effet sur les pratiques des Etats qui n’y ont pas encore adhéré », a-t-il déclaré. « Peu de pays vont à présent utiliser encore couramment des sous-munitions durant les conflits grâce au message politique, légal et moral envoyé par la Convention », a renchéri Peter Herby, le négociateur du CICR pour les armements.
Ces armes ont été notamment utilisées durant la guerre du Vietnam, dans les Balkans ainsi qu’au Liban Sud en 2006, et continuent de faire des victimes [2]. Au Laos, qui accueillera, en novembre, la première réunion de suivi de la Convention, 300 personnes en moyenne sont encore tuées ou blessées chaque année par des sous-munitions larguées durant la guerre du Vietnam, selon la Coalition contre ces armes. L’Afghanistan a signé la Convention d’Oslo et le coordinateur de la Coalition contre les sous-munitions, Thomas Nash, souligne que la force de l’Otan, dans ce pays, a décidé depuis 2003 ne pas y employer ces armes. « Les gens ont réalisé au cours des 20 dernières années que si vous tuez des civils durant des opérations militaires, vous n’atteindrez pas les objectifs politiques de ces opérations. Et de ce point de vue, les armes à sous-munitions tuent bien trop de civils », a-t-il remarqué. Amnesty International a affirmé en juin qu’un missile de croisière américain chargé de sous-munitions avait été utilisé en décembre 2009 au Yémen, lors d’un bombardement contre des rebelles qui avait fait 55 morts, des civils en majorité.
[2] sur l’utilisation d’armes prohibées par Israël lors de son attaque contre le Liban en 2006, voir : "Ce que nous avons fait est fou et monstrueux" ou encore Dans les ruines du Liban sud
publié par el Watan
notes : C. Léostic, Afps

Choc ou alliances des civilisations. Quelles initiatives concrètes pour la Méditerranée ?

publié le samedi 31 juillet 2010
Mustapha Cherif

 
La culture au coeur des relations méditerranéennes

Choc ou alliances des civilisations, politique et religieux, coopération décentralisée, stratégies d’influence des médias... La Méditerranée est-elle un trait d’union ou une ligne de fracture entre le Nord et le Sud ? [1]
"Dialogue des civilisations, ces mots sont tellement usés que leur usage est suspect. Dans un contexte où le cynisme, la cruauté, l’arrogance et le double langage sont banalisés, ne servent-ils pas d’enseignes à l’entreprise de justification de l’hégémonie, dont la loi est celle de la concentration croissante des richesses et des instruments de décision, même si d’autres pôles sont en cours d’émergence ? Celui qui se déclare algérien, maghrébin, arabo-berbère, méditerranéen, héritier de l’esprit de l’Andalousie, connaît la valeur réelle de ces mots. Alors que les deux mondes, Occident –Orient, sont mêlés et imbriqués, et qu’aujourd’hui on peut dire que la distinction entre eux n’a pas vraiment lieu d’être, des propagandistes cherchent à les opposer et à imposer l’amnésie afin de faire diversion aux injustices et souffrances.
Durant des siècles se sont mêlés des peuples d’Orient et d’Occident. Dialoguer est une pratique ancienne et sage. Pourquoi ne serions-nous pas capables de nous penser comme un creuset pour une culture encore inédite ? La « mondialité » peut porter les chances d’un espace commun de sens possible. Ce monde est bien le nôtre, celui de tous. Cependant, trois causes au moins nourrissent la logique de la confrontation : 1- L’ignorance de partout 2- Les injustices de partout et 3- la stratégie d’hégémonie. Cela suscite un regain de la xénophobie, d’une part et du fanatisme d’autre part. Il y a urgence à dialoguer, pour désenclaver les cultures, car les identités repliées et cloisonnées sont la manifestation du problème. La sortie de crise morale passe par le dialogue. On ne dialogue pas pour dicter sa loi. Un dialogue n’est pas seulement un face-à-face avec autrui, il est avec soi-même acceptant d’être transformé. On a besoin les uns des autres, nul ne peut faire face seul aux défis complexes et multiples de notre temps, les enjeux sont les même pour tous, à commencer par celui du risque de déshumanisation, quelque soit la différence entre faibles et puissants.
Le Choc : une diversion
Les écrits depuis 1993 sur la stratégie du « clash des civilisations » entre le monde musulman et l’Occident, bien avant les attentats du 11 septembre, sont l’expression de l’invention d’un nouvel ennemi après la chute du mur de Berlin en 1989. L’islamophobie est une diversion antérieure au terrorisme des faibles. Le concept de « civilisation » réduit les tensions à des questions culturelles. Malgré des siècles de rapports féconds, l’islamophobie au Nord et les courants du repli au Sud présentent des tableaux tronqués, ils nient les liens entre le « Grec » et « l’Arabe », entre le « Juif » et l’Arabe », entre le « Latin » et « l’Arabe ». Des jugements de valeur, qui refusent la diversité et opposent des blocs imaginaires : Jésus et Mohammed, l’Orient et l’Occident, l’islam et le christianisme, le barbare et le civilisé.
L’Occident a été judéo-islamo-chrétien et gréco-arabe. Le monothéisme, l’humanisme et la Méditerranée sont nos sources communes, combinées, entremêlées et recomposées. Il n’y a pas d’hostilité entre les civilisations, mais des courants tentent de cibler autrui différent comme ennemi, afin que les pulsions de violence qui sommeillent en chacun exacerbées par les misères économiques, psychiques, culturelles, les injustices, les inégalités et l’oppression, se déversent dans une autre direction que celle des systèmes en place. C’est la politique du bouc émissaire, de la culture de la peur, qui désigne l’autre comme une menace. Il ne peut y avoir d’entente, d’échange et de partage si d’entrée de jeu on appréhende l’autre comme un ennemi potentiel. Dans ce contexte les courants xénophobes dénient à l’autre civilisation les points de convergences, la part qu’elle a prise à l’œuvre de l’humanité et refusent de reconnaitre en l’autre son droit à vivre librement ses multiples appartenances.
L’on ne pourra pas comprendre l’humanisme, « qu’est ce l’homme ? », sans dialoguer avec les autres civilisations. « L’humanisme ne pense pas assez haut l’humanitas de l’homme », reconnait la philosophie moderne. La civilisation de l’humanisme n’est pas visible, c’est parfois même le contraire qui transparait. Il ne s’agit pas de faire retour au religieux comme solution, mais de réactiver l’humanisme, car 1- l’autrui contribue à faire connaître ce que veut dire être « humain » 2- s’ouvrir à des normes communes a peu à voir avec les dangers que les approches fermées font courir à la liberté et à la dignité des hommes 3- vivre ensemble est incontournable. Les défis communs appellent à faire entendre la voix de cultures dignes de leurs hautes traditions, non pas "modérées" - qualificatif faible- mais celles de l’interprétation, de l’ouverture, de la hauteur de pensée, ce qui n’exclut pas la vigilance, la critique et l’autocritique. Retrouver des normes universelles qui organisent la vie en commun sans avoir à nier autrui est une des tâches essentielles de notre temps.
Des politiques et des médias imposent au Nord un discours négatif sur autrui différent au Sud sur l’Occident. Edifier des passerelles est vital. La centralité de la Méditerranée ne peut être niée, en conséquence on ne peut se limiter à des projets techniques. Sans les dimensions humaines et culturelles, le partenariat sera amputé de l’essentiel. Nous aurions espéré que l’UPM par exemple, soit celle d’un partenariat entre l’Union européenne et le monde arabe. La visibilité aurait été grande. Il n’y aurait eu aucune appréhension, ni celle d’une normalisation prématurée avec Israël, ni celle qui dévie l’adhésion de la Turquie à l’UE. Les concepts de monde arabe et Maghreb qui renvoient à des dimensions géoculturelles doivent êtres gardés en vue, la Méditerranée n’est pas le lieu de la dilution.
La culture religieuse au cœur du débat
Sur le plan de l’histoire culturelle, l’Occident s’est forgé en opposition à ses altérités, dans un mouvement de rupture et d’appropriation de la raison, de la démocratie et de la sécularisation. Ces concepts méritent d’être réinterrogés, car contrairement aux préjugés, ils ne sont pas étrangers à d’autres cultures comme celles de l’islam. Dans ce contexte, alors que tous les Européens ne confondent pas islam et fanatisme, l’inconscient collectif considère le « musulman » comme l’étranger qui résiste au système de valeurs modernes. Que les musulmans fassent lever des questions est légitime. Nous devons accepter les critiques au sujet de conduites problématiques, mais pas les amalgames et les jugements hâtifs. Il est vital de reconnaitre à l’autre le droit de garder vivante sa culture, sans se couper du monde.
Les Lumières de la raison instrumentalisée n’ont pas éclairé la totalité de l’être humain, alors que des questions culturelles comme « Comment apprendre à vivre ? », « Qu’est-ce que l’homme ? », « Quel sens donner à la vie ? » se posent, on nous refuse le droit à la critique. Les Européens s’interrogent sur l’état du monde musulman : les débats sur la réforme, le pluralisme, la bonne gouvernance ? Ce n’est pas être islamophobe de poser ces questions. Mais, à l’opposé de ce que des non-musulmans peuvent penser, il existe une islamophobie où c’est le Musulman, comme le Juif hier, qui est condamné. Hantée par la religion, l’Europe est traversée par deux mouvements, l’effort pour faciliter le partenariat et une tournure crispée envers les musulmans.
Il n’est pas exact que tout l’Occident assimile « musulman » et « fanatique », mais des propagandistes pour masquer leurs impasses parlent de choc et font croire que l’Islam est source de violence. Ces propagandistes « fabriquent » de la terreur et des « extrémistes » et les manipulent pour faire peur et justifier l’occupation et l’hégémonie. Injustices, présence de soldats étrangers, politique des deux poids et deux mesures contredisent, comme en Palestine, les nobles principes prônés par la rive Nord. Dans ce contexte, se pose une question pour faire reculer la logique de la confrontation : Jusqu’à quand vont durer les injustices et les agressions qui produisent désespoirs, extrémismes et culture de la colère au Sud et culture de la peur au Nord ? Il est urgent de penser ensemble les causes.
L’opinion finit par ne plus voir que la violence de l’autre, dont elle ne saisit pas les raisons. Certes, le monde entier constate à quels extrémismes peut conduire la dérive fanatique de certains « adeptes » d’une grande religion comme l’islam et constate l’injustifiable pérennité des despotismes. L’usurpation du nom de l’islam est injustifiable, et « Le musulman est parfois une manifestation contre sa religion » comme l’affirmait, il y a un siècle, l’Emir Abdelkader El Djazairi. Mais comme le souligne Hannah Arendt, c’est souvent le résultat de provocations et d’injustices : « Dans les régimes totalitaires, la provocation… devient une façon de se comporter avec son voisin » Même si les préjugés datent de 15 siècles, l’islamophobie depuis la fin de la guerre froide, exploite et amplifie les faiblesses du monde musulman et les réactions aveugles des groupuscules.
La stratégie du choc des civilisations pratique la désinformation et impose l’idée que résister aux occupations est un acte de violence inadmissible. Le droit à la résistance réside pourtant dans les conditions qui autorisent –ou interdisent- son recours. En Islam, comme l’exprime St Augustin pour la notion de guerre juste, la question de la résistance ne peut être pensée en dehors du contexte. Ainsi, le recours à la « violence » comme contre-violence, dernier recours imposé, ne peut intervenir que si la paix, la survie, la dignité sont compromises. L’Humanisation des rapports humains a été possible grâce à l’interculturel. Le Méditerranéen n’a pas découvert le sens du partage le plus large c’est-à-dire celui de la communauté humaine seulement au XVIIIe siècle qui reste un moment phare de l’émancipation. La logique du conflit est aujourd’hui exacerbée à la fois par la représentation non seulement areligieuse mais anti religieuse du monde moderne et par l’instrumentalisation de la religion par des forces rétrogrades de la tradition.
Droit à la critique
Nous avons abouti à une situation ambivalente. Malgré les acquis de la sécularisation, le développement du savoir détaché des sources religieuses, comme l’a été le savoir arabe, l’émancipation en Europe vis-à-vis de l’autorité religieuse et une séparation logique de la sphère du public et du privé, nous avons aussi abouti à la marginalisation des principes abrahamiques et à une remise en cause de la possibilité de la justice et du vivre ensemble. Le risque est celui d’une neutralisation des deux dimensions de l’homme : le politique (la démocratie) et le religieux (une éthique). Après les mots d’ordre totalitaires « tout est politique » ou « tout est religieux », on impose « rien n’est politique, rien n’est religieux », pour laisser place au nihilisme et au nouveau mot d’ordre : tout est marchandise. Cette vision impose une seule culture, une seule conception du progrès et des relations entre les peuples, résultat le dialogue de sourds est désastreux : les relations internationales ne sont pas démocratiques, les despotismes perdurent et la désorientation s’étend. Pratiquer l’autocritique afin de dépasser ses propres points d’aveuglements au sujet des dérives de sa tradition et celles du désordre mondial est un devoir.
Sur le plan de la culture, le citoyen moderne n’a plus de lien avec la religion ou le sacré. Ce n’est pas la fin du monde, mais c’est la fin d’un monde. Et il nous faut le comprendre pour inventer un autre qui échappe à toute fermeture. Sur le plan du savoir, l’aspect inquiétant est la remise en cause de la possibilité de penser autrement. Deux récits paradoxaux de la culture moderne affirment que la culture religieuse doit servir à consoler sans se mêler du monde ou bien est aliénation. Faute d’échanges culturels continus et conséquents la recherche commune du juste, du beau et du vrai autour de la Méditerranée est hypothéquée. Les impasses se mondialisent, aggravées par la politique des deux poids et deux mesures, ce qui rend urgent le besoin d’une civilisation du vivre ensemble.
Finalité du dialogue
Le dialogue des cultures a trois buts : l’interconnaissance, une parole commune et la justice, c’est ce qui nous manque le plus. Ce que la rive Nord doit comprendre : l’extrémisme est l’anti-islam et le musulman a participé et le peut encore, à la recherche de la civilisation. Ce que la rive Sud doit comprendre : son ouverture sur la plus grande des communautés celle de l’humanité, où se conjuguait unité et pluralité, avait permis le vivre ensemble autour de la Méditerranée. Il reste un avenir si les discours dominants mettent fin à la politique de l’épouvantail et au déni de ce que nous avons en commun, s’ils arrêtent d’imposer de manière régressive une vision monolithique de leur propre culture et celle des autres et si l’on met un terme à l’instrumentalisation de la religion.
Les mesures concrètes en découleront pour éduquer, informer et vivre ensemble comme une chance partagée. Mon pays, l’Algérie, carrefour des cultures et terre d’hospitalité, par-delà son histoire douloureuse et ses souffrances, ou à cause de cela, assume sa méditérranéité et reste plus que jamais attaché au dialogue des cultures en vue de forger une nouvelle civilisation universelle. Tout en étant conscient des pesanteurs, de l’asymétrie des forces et des déséquilibres, mais sachant que nul n’a le monopole de la vérité et que la justice envers autrui est au cœur de toute dynamique porteuse d’avenir, l’homme de bonne volonté ne peut que choisir l’amitié dans la franchise. ”  [2]
[1] Dossier sous la direction de Didier Billion, chargé de mission auprès du directeur de l’IRIS
Réalisé avec le soutien du ministère de l’Education nationale.
Avec la participation de Gabriel Baudoin, assistant de recherche à l’IRIS Ce dossier rassemble les interventions prononcées lors du colloque « La Culture au coeur de la Méditerranée » organisé à Nice par l’IRIS, avec le soutien du Sénat, l’Assemblée parlementaire de la Méditerranée et la Ville de Nice le 28 avril 2010
[2] 1- Lettres aux français édits Anep 2- Le Système totalitaire, Edition Essais-Points.
Mustapha CHERIF, Philosophe, Professeur de relations internationales, ancien ministre algérien de l’Enseignement supérieur
Mail : intellectuels@yahoo.fr
publié par l’IRIS
Dossier sous la direction de Didier Billion